♦[N2/3] Le narcissisme

On poursuit notre exploration du narcissisme avec cette fois-ci le narcissisme vulnérable, et collectif ; D’où provient-il ? Le narcissique est-il libre, autodéterminé ?

Cet article est la suite de :

Image d’entête « the great covfefe » par gyaban


Le narcissisme vulnérable


Ils ont en commun avec les narcissiques grandioses de partager les fantasmes de supériorité et de réussites extrinsèques de gloire, de pouvoir, de richesse ; ils quêtent une reconnaissance et une attention à laquelle ils accordent une importance démesurée ; et enfin, ils ne tiennent pas compte des autres, estiment que tout leur ait du. Il n’y a pas d’empathie, l’autre n’est qu’au mieux un miroir pour eux. Ils cochent aussi beaucoup de points du DSM-5 excepté que chez eux, c’est caché (le narcissisme vulnérable est aussi nommé « covert narcissism », narcissisme caché), beaucoup moins visible et bruyant.

Il est introverti, il a honte de ne pas être ce qu’il voudrait être (c’est-à-dire extrêmement supérieur à autrui), est marqué par l’anxiété, la dépression, et obtient un haut score en névrosisme sur les big five (mesure de la personnalité). Son estime de soi est basse. Les chercheurs qui accolent théorie de l’autodétermination et narcissisme pensent que ce profil a les trois besoins fondamentaux sapés ; il serait en orientation contrôlée et non autodéterminé.

Il est hypersensible à la critique (c’est aussi le cas chez le narcissique grandiose, mais cela s’exprime de façon différente), et a tous les micros signes qui peuvent être perçus comme une attaque à son ego (même s’ils n’en sont pas), ainsi il va fantasmer de nombreux ennemis, nourrir des plans de vengeance. Les chercheurs disent que ce narcissisme vulnérable se retrouve chez les auteurs de massacre dans les écoles aux USA : leur dimension narcissique peut passer inaperçu (car ils ne l’expriment pas publiquement, le cache) mais l’individu nourrit des fantasmes énormes de supériorité, qui contraste avec leur situation « normale » voire avec une vie assez caractérisée par l’impuissance (leur narcissisme les empêche de nouer des relations amicales ou amoureuses, puisqu’ils n’y mettent ni empathie ni réciprocité), et la frustration n’en est que plus grande étant donné l’énormité de ce qu’il voudrait. À cela, ces individus cumulent une absence d’efforts sociaux comme le simple fait d’être gentil, poli, aimable, à l’écoute.

Elliot, manifestement narcissique vulnérable, a aussi laissé des témoignages vidéo :

Je pense qu’il y a peu de doute sur le fait que le narcissisme d’Elliot Rogder soit vulnérable, son autobiographie n’est que plaintes sur son malheur, sa honte, ses humiliations, ses déceptions, or on peine à trouver des causes concrètes de ce malheur : il n’est pas pauvre (même si son père subi une crise, Elliot Rodger va à des événements qui ne sont accessibles qu’à des millionnaires, grâce aux relations de ses parents), il n’a pas subi de traumatisme, ni n’a été violenté même si la période du collège était émaillé de quelques moqueries à son sujet. Ces « drames » de sa vie se résumaient entre autres à cette fois où il n’a pas reçu en premier la part de son gâteau d’anniversaire, à ces fois où sa belle mère l’incitait à boire du lait ou de la soupe, à cette fois où son père avait attribué à sa petite sœur la chambre sur laquelle il avait des vues, et ce pour des raisons pratiques (d’ailleurs ils ont fini par céder tant il faisait de crises, il avait entre 9 et 13 ans), a cette où une fille l’a bousculé, ou à cet ami qui a davantage parlé à un autre que lui, à ces couples d’inconnus qui osent s’embrasser dans les lieux publics, ou à ce billet de loterie perdant, à ces filles inconnues dans la rue qui ne le regardent pas alors qu’il est bien habillé, etc. Il vit la moindre adversité comme un enfer, à cause de son haut narcissisme notamment, qui le fragilise pour tout, parce qu’il devrait n’avoir que des avantages, des droits sur tout, toujours plus que les autres.


Le narcissisme collectif


Il s’agit là encore des mêmes caractéristiques du narcissisme, mais que l’individu applique à son groupe de référence (son université, son entreprise, sa nation, son origine ethnique…) : ce groupe est supériorisé, a tous les droits (plus que les autres), doit être reconnu à sa juste valeur (c’est-à-dire sa supériorité) sans rien faire de particulier. C’est à différencier du patriotisme constructif ou encore de la reconnaissance à être dans un groupe aimé : ici l’élément déterminant est que, comme dans le narcissisme individuel, il y a une hypersensibilité à la menace (réelle ou imaginaire). Le narcissique collectif va repérer des micro atteintes à l’ego de son groupe et être très agressif concernant « l’ennemi ». Ainsi il va percevoir l’exogroupe comme une menace à la « pureté » de son groupe, il va par exemple systématiquement voir les immigrés et étrangers comme une menace. Ce lien au groupe n’est pas lié au plaisir intrinsèque, à la gratitude ou aux facettes positives de cette identité collective, mais davantage à cet aspect de constante menace. Le narcissisme collectif est davantage lié au narcissisme vulnérable et donc lié à une basse estime de soi, mais également au haut RWA, haut SDO. Par exemple, le vote pro-Brexit est davantage lié au narcissisme collectif, plus qu’au patriotisme, idem pour le vote pour Trump : il ne s’agit pas là de gens qui aiment leur nation d’une façon positive, constructive, critique, mais plutôt de gens hypersensibles à la menace, y compris quand cette menace est infondée; ils sont emprunts d’une hyper-susceptibilité qui, selon certains spécialistes, fait penser à la paranoïa selon certains spécialistes (nous pensons notamment à Luigi Zola avec son ouvrage « Paranoïa, La folie qui fait l’histoire »).

Cette hypersensibilité à la menace peut même toucher la perception; ici une image d’un bus qui a enflammé ces groupes narcissiques collectifs car ils croyaient qu’il s’agissait de femmes voilées :

Source : le monde

Ou encore ici : la personne a lu la couverture dans cet agenda « I hate mon pays » alors qu’il était écrit « i hate monday » :

Source : https://twitter.com/maximehaes/status/1171541729104863233

À noter que renforcer le narcissisme collectif peut être aussi employé comme un levier d’une stratégie de propagande politique, et parfois par de grands narcissiques : c’est le cas de Trump, qui a appuyé toute sa campagne sur le narcissisme collectif « make america great again », mélangeant fantasme de haute supériorité de la nation et menaces des exogroupes (immigrés, groupes minoritaires…). Son narcissisme grandiose est assez validé et revalidé par les spécialistes https://www.ctpost.com/local/article/Yale-to-hold-psych-conference-on-Trump-s-mental-11084757.php. À noter que selon le chercheur Altemeyer, celui qui crée l’échelle d’autoritarisme de droite, Trump serait sans doute haut score (en SDO, sur l’échelle Power-mad également) : https://www.theauthoritarians.org/donald-trump-and-authoritarian-followers/).

Chez Elliot on l’a vu, il y a des traces de narcissisme collectif mélangé à un narcissisme individuel car il estime qu’il est intolérable qu’un non-blanc soit en couple ou ait du succès auprès des filles alors que lui-même demeure célibataire :

« Comment ce garçon noir, laid et inférieur pouvait-il avoir une fille blanche et pas moi ? Je suis beau et je suis moi-même à moitié blanc. Je suis issu de l’aristocratie britannique. Il descend d’esclaves. Je mérite plus que lui. […] si ce vilain cochon noir a pu avoir des relations sexuelles avec une fille blanche, blonde, à l’âge de treize ans alors que je dois subir la virginité toute ma vie, cela prouve à quel point le genre féminin est ridicule. Elles se donnent à ce garçon sale, mais elles me rejettent ? L’injustice ! Les femmes ont vraiment quelque chose de mentalement mauvais. Leurs esprits sont défectueux et à ce stade de ma vie, je commençais à le voir. » Autobiographie d’Elliot Rodger, https://www.documentcloud.org/documents/1173808-elliot-rodger-manifesto.html

On voit bien aussi dans ce témoignage que son narcissisme l’empêche totalement de penser à se remettre en cause, ou de chercher à développer ses qualités sociales : les seuls « efforts » qu’il mettra en œuvre seront d’acheter des vêtements de luxepuis de marcher dans la rue en les exhibant. Mais jamais dans son témoignage il ne pense à écouter les autres, s’intéresser à eux sincèrement, découvrir leurs qualités sans en être jaloux, être plus gentil, moins dans le préjugé… bref toutes les solutions qui lui auraient permises d’avoir de belles relations amicales ou amoureuses sont évincés, parce qu’il s’estime avoir droit à tout sans rien devoir fournir de particulier, ce qui est une grande caractéristique du narcissisme.

Comparatif du narcissisme grandiose et du narcissisme vulnérable dans les différences de personnalité :


Légende big five/narcissisme : On voit que les narcissiques, qu’ils soient vulnérables ou grandioses ont peu d’agréabilité, les narcissiques grandioses étant cependant beaucoup plus non-modestes que les vulnérables. Ils diffèrent grandement dans le névrosisme, qui est un trait des vulnérables mais pas des grandioses ; ils diffèrent aussi grandement sur la dimension extraversion (pour les grandioses) et introversion (pour les vulnérables). Le trait ouverture à l’expérience n’est pas en lien avec le narcissisme qu’il soit vulnérable ou grandiose, tout comme le trait consciensiosité.


Pourquoi le narcissisme ?


Les anciennes théories psychanalytiques pensaient que ces troubles narcissiques venaient compenser une piètre image de ceux qui en étaient atteints, à cause d’atteintes diverses, notamment le fait de ne pas avoir reçu d’attention. On peut voir effectivement, ponctuellement, des personnes aux besoins psychologiques fondamentaux sapés, chercher à les compenser via des comportements narcissiques, mais ce n’est pas forcément durable, ni forcément lié à des atteintes dans la petite enfance.

En dehors de la psychanalyse, une hypothèse totalement autre a vu le jour, expliquant que les troubles narcissiques concernaient au contraire des individus qui ont été survalorisés durant leur enfance, d’une façon qui, par conséquence, infériorise le reste du monde ainsi, ils ont gardé cette image supérieure au détriment d’autrui comme étant la réalité et en conséquence de quoi s’estime avoir tous les droits (et plus que les autres), être naturellement supérieur et exceptionnel même sans rien faire de particulier. Ces dernières années en France, des psychologues cliniciens ont théorisé sur la question de l’enfant-roi (par exemple « de l’enfant roi à l’enfant tyran » Didier Pleux), ou sur l’enfant tyran et ses conséquences (un adulte qui devient tyran). Les recherches en psychologie expérimentale (notamment sociale et cognitive sur lesquelles nous basons cet article, qui serons cité en dernier article) ont davantage validé cette hypothèse.

On est ce que l’autre dit que l’on est : ainsi le narcissique a été élevé dans un bain social « narcissisant » où il était dit qu’il était absolument supérieur et exceptionnel contrairement à autrui, où on lui laissait tout faire sans limite ni cadre empathique (par exemple avoir des interdits pour éviter de faire du mal à autrui ou pour le respecter), où il était glorifié. Attention à ne pas confondre cette éducation narcissante avec une éducation bienveillante : une éducation bienveillante et aimante pose un cadre, avec des limites à respecter (notamment pour apprendre à l’enfant à respecter autrui), et valorisent les comportements altruistes. Ici c’est le contraire : peu de cadres, peu de limites, les parents sont quasiment l’esclave de l’enfant.

À cela, la sociabilisation et la culture ont pu perpétuer cette image grandiose – surtout dans le cadre du narcissique grandiose en récompensant cette attitude de supériorité dans le cadre de la compétitivité dans certains milieux (scolaires, professionnelles….): les attitudes narcissiques sont confondues avec la notion de leadership, ainsi les environnements sociaux tendent à percevoir positivement les caractéristiques narcissiques et à faire monter les narcissiques à des postes de pouvoir. Les individus sont charmés par les narcissiques en premier lieu, puis souvent regrettent amèrement de lui avoir offert tel poste à pouvoir : le charme se dissipe très rapidement car les relations avec le narcissiques sont exploitantes, contrôlantes, agressives ; ils prennent des décisions trop risquées, ne sont pas aussi performants qu’ils l’ont vendu dans leurs autopromotions constantes. Ils rejettent ces fautes sur tout le monde, et n’hésitent pas à être malhonnêtes, parfois dans l’illégalité, dans la duperie. Autrement dit, c’est un vrai problème pour l’organisation à long terme et au quotidien.

Comme les parents ont plongé le futur narcissique dans un bain social quotidien où il était considéré comme un dieu, l’environnement social poursuit cette construction fantasmatique avec à la fois une forme d’idolâtrie des narcissiques (admiration totale), à tomber sur leur charme et leur offrir tout ce qu’ils veulent (gloire, pouvoir, avantages). Puis quand le réel revient au galop, les illusions tombent.

Cependant l’esprit de cour qui entoure et le narcissique et le nourrit d’admiration, de flatterie, de compliments démesurés, peut perdurer : c’est une façon d’entrer dans les grâces du narcissique qui aiment que les autres fassent miroir à sa grandeur (et donc la cour espère en retour des opportunités, or généralement le narcissique ne suit pas vraiment la loi de réciprocité) ; c’est là une façon de le manipuler également, voire même parfois la seule façon de garder un contrôle sur ses actions pour qu’elles ne provoquent pas un désastre. Celui qui ne l’idolâtre pas, qui lui fait ne serait-ce qu’une petite pique, lui souligne un tout petit problème est rapidement mis dans la catégorie ennemi à abattre le narcissique étant toujours hypersensible aux menaces à son ego. Il est donc difficile de savoir si cette idolâtrie dans l’environnement social du narcissique est sincèrement « envoûtée », ou si elle est déterminée par son propre narcissisme ou son orientation à la dominance sociale (pour conquérir le pouvoir à son tour) ; ni de savoir si cette idolâtrie n’est qu’instrumentale (de l’ordre de la manipulation et de l’influence pour tenter de contrôler le narcissique, éviter des décisions malheureuses de sa part, voire protéger l’environnement social de ces méfaits).

Il y a un bain culturel narcissique également fort à notre époque : il nous est même parfois dit de « devoir » se vendre pour trouver du travail, un encouragement à l’autopromotion narcissique. Les modèles narcissiques sont abondamment mis en avant, la Téléréalité n’est basée que sur une course à celui qui aura le narcissisme le plus flamboyant voire offensif, et pour faire de l’audimat elle s’appuie sur la comparaison sociale descendante (via l’émotion schadenfreude, la joie de voir autrui dans une plus mauvaise posture, mauvaise condition que soi ou infériorisé par aux autres) qui est une pratique courante des narcissiques pour s’autovaloriser. La publicité, la société de consommation appuie sur des leviers narcissants : acheter ceci/cela pour être meilleur que le voisin, réussir, avoir plus de gloire, être supérieur, s’élever au-dessus de la masse, gagner, le tout en entretenant une confusion magistrale entre être et avoir. On voit cela dans l’autobiographie d’Elliot : les seules démarches qu’il met en œuvre pour avoir plus d’amis ou une petite amie, c’est d’acheter, puis de parader avec ces nouveaux habits, lunettes de luxe. Il croit que cela va attirer l’amour et l’amitié vers lui, exactement comme on le verrait dans une pub pour voiture.

Les réseaux sociaux, notamment Instagram ou encore Linkedin sont des marchés où l’on se vend, où il y a compétition en terme d’attention sociale : les narcissiques sont donc très prompts à les utiliser et donc à mettre au diapason tout le monde, à ce que chacun, comme eux, se mette à penser l’utilité des réseaux sociaux non comme un moyen de partage, mais comme ayant pour but de « percer », de gagner de l’attention, même si cela passe par le bad buzz. La hiérarchie de nos organisations, la compétition sont aussi des bains qui rendent l’attitude narcissique presque comme une norme à suivre, y compris pour ceux qui ne l’étaient pas au départ.

À noter que les conditions sociales favorisées semblent aussi gonfler le narcissisme, contrairement au vécu concret de crises économiques qui font en général baisser le narcissisme de la population selon les études (notamment sur le fait d’être face aux manques d’opportunités d’emploi par exemple, les sources seront dans le dernier article), il y a donc à suspecter qu’une vie extrêmement favorisée d’un point de vue financier (grande richesse, bourgeoisie, et tout ce qui écarte des problèmes socio-économique du commun des mortels) n’aide pas à construire l’humilité. C’était le cas d’Elliot Rodger, dont les parents travaillent dans le cinéma, sont connus. Mais ce climat social « favorisé » c’est aussi tout simplement les faveurs discriminatoires qui se perpétuent dans la société : on voit qu’Elliot, étant un homme plutôt blanc (il est métisse asiatique), et parce qu’il est blanc, s’attend et le dit clairement, à avoir plus d’opportunités sans rien faire de particulier, a avoir plus de choses « supérieures » qu’un homme perçu comme davantage non-blanc ou qu’une femme, à avoir des bons postes sans même avoir les compétences ou l’expérience pour, rien que parce qu’il s’estime supérieur selon un narcissisme à la fois collectif et individuel. Mais dans sa vie, il semblerait que les environnements sociaux professionnels n’ont pas été discriminatoires et que les femmes qui l’attirent ne hiérarchisent pas les hommes selon leur couleur de peau, et c’est justement ce point-là qui l’enrage. Il trouve injuste que les environnements sociaux et leurs acteurs ne soient pas injustes, inégalitaires, discriminants en sa faveur. Cela pose beaucoup de questions sur l’avenir: si la société tendait à être de plus en plus égalitaire, moins discriminante, plus juste, est-ce que ce profil narcissique-collectif n’en serait-il pas d’autant plus enflammé, se manifestant davantage avec des postures et discours de plus en plus radicaux ? N’assiste-t-on pas déjà à ce type de manifestation enflammée dès que se pose dans les débats les questions d’égalité et de lutte contre les discriminations?


Le narcissique est-il autodéterminé, libre ?


Peut-être que le narcissique grandiose charme en premier lieu car il semble vivre pleinement, être dans une liberté impressionnante, une confiante maîtrise de soi et de l’environnement, qualités qu’on tendrait à nommer « force ». Le fait qu’il se contrefiche de la morale et des normes habituelles semblent aussi constituer des points qui nous envoûtent.
Cependant, il est impossible de voir de la liberté dans un fonctionnement aussi prévisible que celui d’un narcissique. On ne peut pas considérer comme de la force le fait d’être totalement déterminé (et non autodéterminé), à la merci, sous emprise de son unique croyance en sa supériorité. Il n’y a pas de force à être incapable de nouer une vraie relation sociale enrichissante qui ouvre des horizons, nous développe, nous grandit, nous fait vivre pleinement. Il n’y aucune force à être hypersensible à la critique au point de percevoir de la menace dans des événements absolument neutres ou anodins : par exemple dans certaines expériences, les narcissiques se sentent menacés lorsqu’un autre aime un tableau que lui n’aime pas, et il va l’agresser verbalement, le voir en ennemi.

Mais le signal de non-autodétermination, d’absence de liberté est à mon sens l’énorme prévisibilité du fonctionnement narcissique. La seule « surprise » peut venir de comment les environnements sociaux auraient réussi à ne le canaliser ou à l’orienter dans une direction ou une autre. Le narcissisme vulnérable, ne paraît surprenant que parce que son narcissisme est caché, mais lorsqu’on peut voir sa façon de fonctionner, il fonctionne sur un modèle très prédictible, très répétitif, très peu changeant : l’autobiographie d’Elliot Rodger est parlante à ce sujet. Tous les événements qui le marquent, qu’il vit, sont traités de la même manière à chaque fois, la seule évolution est une escalade d’agressivité, de haine, de frustrations de moins en moins contrôlées. Le narcissisme est comme un programme qui réduit la vie à, d’une part, la peur, la crainte des menaces à l’ego et d’autre part la quête des satisfactions à l’ego, l’autre n’existe que comme fournisseur, objet utilitaire. Ainsi la vie qui nous apparaît ici est extrêmement pauvre, coincé dans l’ego, et pour les narcissiques vulnérables très peu enrichissante et profitable.

Ce schéma résume assez bien la dynamique narcissique et à quel point ce « programme » va être très difficile à faire progresser, changer également :

Les chercheurs parlent de système narcissique, qui s’autoalimente, se renforce lui même en gonflant le narcissisme, en considérant les autres comme des objets. Ce système est très prévisible, le narcissique est très facilement manipulable (il suffit de nourrir ses idées grandioses à propos de lui-même) donc déterminable. Les psychologues disent que cesser de l’alimenter par l’admiration crée chez lui des symptômes de sevrages, exactement comme le manque lors d’une addiction : il est donc prisonnier du regard supériorisant d’autrui auquel il est accro, il n’est pas libre d’être et de se sentir bien s’il n’a pas sa dose d’admiration, paradoxalement il est totalement dépendant de l’environnement social dont il dédaigne l’humanité. Ce qui complexifie encore plus l’éventuel aide qu’on pourrait lui donner.

La suite : les solutions pour canaliser le narcissisme

Viciss Hackso Écrit par :

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