⬛ Pourquoi la notion de gauche et droite, ainsi que celle de fascisme veut dire quelque chose

Ceci est initialement un de nos thread publié ici : https://twitter.com/ChaykaHackso/status/1507278353765650432 On le reproduit sur le site pour pouvoir le partager ailleurs. 

Bon, petite colère du matin (car la colère ça a du bon parfois et ça ne s’oppose pas à la sacro-sainte Raison 😉 ): le fascisme est un sujet hautement abordé, étudié, par les sciences, dans diverses disciplines, sous divers angles (histoire, socio, psycho, et j’en passe…).

Si le mot « fascisme » vous gêne, car parfois utilisé à tort et à travers (j’en conviens), alors prenez un concept moins connoté, mais synonyme (en psycho): l’autoritarisme de droite.

Ca ne veut rien dire ? C’est précisément défini par les chercheurs [Altemeyer] en terme d’attitude et de comportement : agressivité autoritaire [forts préjugés à l’égard des groupes ext., principalement les minorités, migrants, LGBT+, etc., groupes considérés comme menaçants]; conventionnalisme, voire traditionalisme [ça se traduit par un refus d’un changement social progressiste, un statut quo, un déni des inégalités, des rapports de domination, voire la nostalgie d’un passé fantasmé qu’on voudrait retrouver] ; et une soumission à l’autorité [aux autorités qu’on considère comme légitimes selon notre système de croyance, système de croyance qui prône une certaine hiérarchie].

Et ce ne sont pas là juste des définitions purement formelles, tout cela a des conséquences concrètes, qui ne cessent à se rappeler à nous via l’histoire. Les pires atrocités (violences stimulées par la haine, discriminations à l’échelle d’une société, terrorisme, génocide…) sont en étroite association avec l’autoritarisme de droite. Gauche/ droite, c’est artificiel tout ça, ça ne veut rien, ce n’est pas scientifique ?

Là encore, les chercheurs (en psycho politique) ont fourni un travail colossal pendant plus de 70 ans. Nos affinités politiques ne sortent pas de nulle part, elles sont déterminés par tout un ensemble de facteurs situationnels et dispositionnels; on se sent attiré (ou répulsé) par des affinités idéologiques car cela répond notamment à des besoins et motivations personnels, eux-mêmes déterminés par nos environnements sociaux.

Gauche/droite, ou progressisme/conservatisme, ça veut dire quoi alors selon ces chercheurs ? En psycho pol, on peut par exemple proposer ceci:

Deux dimensions fondamentales axiologiques (=valeurs) permettent d’interroger la droite et la gauche en terme d’attitude et de comportement [Jost, 2021] :

• Préconisation VS Résistance aux changements sociaux
• Rejet VS acceptation des formes sociales économiques et politiques d’inégalités

Donc, la différence gauche/droite peut se définir en terme de motivations divergentes pour maintenir ou justifier le statu quo dans la société. En terme de valeurs, la gauche met l’accent sur le progrès et l’égalité, la droite sur la tradition et la hiérarchie.

J’aurais tant à dire sur tous ces travaux, que je trouve si précieux (toute ma gratitude à tous ces chercheurs et chercheuses qui, souvent en manque de moyens et de reconnaissance pour leurs travaux, travaillent sur ces sujets), et ce n’est pas pour rien si je veux consacrer mon temps et mon énergie à essayer du mieux que je peux de vulgariser tout cela.

Nous sommes dans une période très compliquée (Covid, guerre en Ukraine, élections…), dans un contexte où l’on voit une banalisation d’attitudes pas jojo, je crois qu’il est donc important de rappeler que non, les idées politiques ne se valent pas, que « la neutralité idéologique », en plus d’être illusoire, est une position idéologique (qui a pour conséquence, a minima, le statu quo), et que parler de fascisme ou d’autoritarisme de droite si vous préférez, n’est pas une insulte non réfléchie et sans fondement (quand on parle par exemple de Zemmour).

On a mis toutes les sources à la fin de ces articles/dossiers :

• [F1] Espèce de facho ! Études sur la personnalité autoritaire 

et ici :

• [MQC] Le potentiel fasciste, l’autoritaire et le dominateur.

Une source très intéressante qui fait la revue de ces sujets est « Left and right » de Jost, 2021.

Et sur la question de l’autoritarisme, on fait actuellement une série là-dessus (où on explique notamment comment procède la recherche sur de telles thématiques, avec toutes les impasses et errances qui vont avec) :

L’image d’entête provient de notre dernière vidéo :