♦ La pleine conscience et la compassion… néolibéralisation ou hack social ?

Si vous êtes aussi âgé que moi (la première vague de la génération Y), vous vous rappelez peut être de ce temps où la méditation n’était perçue que comme un truc new-age un peu bizarre qui semblait s’être implanté en occident suite aux années psychédéliques 60/70 des boomers, associés à des croyances ésotériques, à des gourous que les gens avaient trouvés en Inde (ou copié ceux qui s’y trouvait). En occident, dans les années 80/90 la méditation restait une pratique qu’on liait à des communautés plus ou moins farfelues, plus ou moins sectaires. On suspectait la méditation d’être l’un des multiples avatars du conditionnement mental, un instrument de gourou pour mieux asseoir des formes d’emprises. Hors champ sectaire, on associait la méditation au bouddhisme et aux ninjas, sans vraiment comprendre ce qu’il s’y passait, sinon que ça avait l’air soit d’être une façon de faire le vide, de prier ou de s’entraîner à un on-ne-sait-quoi lié à des croyances d’on-ne-sait-où. Ouais, il y avait clairement du dédain occidentalo-intellectuel sur ces pratiques.

Ce dossier est disponible en ebook :

Il est aussi intégré dans ce livre disponible à l’impression :

 

Et puis, début des années 2000, le dalaï-lama et les scientifiques ont commencé à discuter régulièrement et assez profondément (les discussions ont toujours court), et celui-ci a autorisé et même encouragé la recherche sur les moines bouddhistes, la méditation et leurs pratiques. Parallèlement, aux États-Unis, dès les années 70, Kabat-Zinn avait déjà importé la méditation dans un cadre thérapeutique et sécularisé, faisant faire de la méditation à des patients atteints de divers troubles (anxiété, stress, dépression), tout en modifiant les notions et le cadre bouddhiste pour que ça passe crème dans la société.

Et là, ce truc new-age ésotérique, qui en occident était un peu ridiculisé, moqué, ou vu avec suspicion tant il était associé à des représentations sectaires ou fantasques, devenait soudainement un sujet scientifique sérieux, qui, plus étonnant encore, produisait des résultats géniaux sur la psyché, le cerveau des gens. La méditation était efficace pour s’améliorer (notamment son attention, sa régulation des émotions, sa flexibilité mentale), et mieux encore, elle était une forme d’action thérapeutique pouvant aider à surmonter quantité de troubles.

On n’était plus du tout dans l’ésotérique, mais face à un exercice très terre-à-terre amenant vraiment un bien-être : c’était totalement fascinant de voir comment ce sujet, qui avait été dénigré ou ridiculisé par les sceptiques et rationalistes des époques précédentes, se révéler finalement tenir ses promesses de bien-être et d’amélioration, et ce avec des résultats concrets.

Et là, la méditation a commencé à devenir un exercice détaché des croyances religieuses, notamment le champ de la méditation amenant un état de « pleine conscience » (mindfulness) couplé souvent à des objectifs thérapeutiques liés à la dépression, aux angoisses, à l’anxiété… Cet état de pleine conscience, on en avait même déjà parlé ici dans le cadre de la Terror Management Theory (théorie de la gestion de la terreur), parce que plus les gens ressentaient cet état dans leur vie, moins ils étaient biaisés, ce qui est un résultat absolument formidable, qui amenait à se demander si ce n’était pas LA solution de prévention contre tous les biais.

Les recherches sont multipliées à foison à tel point que c’est difficile de s’y retrouver tant il y a d’études associées au terme mindfulness, que ce soit en neuro’, en clinique, en psycho sociale, couplée à d’autres champs comme celui de l’autodétermination, du flow

La science ayant validé la pratique, la pleine conscience a inondé la littérature adressée au tout-venant, notamment sur les champs du bien-être, du développement personnel, du coaching… Les programmes de pleine conscience se sont multipliés en programmes, en séminaire, en voyage, sur des CD, puis les applications mobiles, et enfin ont atterri dans le monde du travail, chez les députés LREM 1 et même au Forum économique à Davos, à destination d’ultrariches et de puissants2.

Bon.

Quand un concept est si bien intégré qu’elle perce dans les sphères des puissants, cela porte malheureusement à la suspecter de complaisance mal placée ou de modifications telles qu’elle n’a plus grand-chose à voir avec la libération, l’empuissantement3 qu’elle portait au départ. Cela pourrait être également un détournement « classique » comme en voit constamment en psycho, où toutes les connaissances ciblant la compréhension du comportement humain et la résolution de ses problèmes sont détournées à dessein de manipuler les gens (par exemple tout le champ de la psychologie cognitive sur l’attention, la perception, le langage se retrouve dans les manuels de marketing pour mieux cibler le client, les faire acheter plus) ; la pleine conscience pourrait avoir été victime de cette récupération par des disciplines et des intérêts qui l’ont vidée de son socle et de ses visées altruistes ou éthiques.

Mais cela pourrait être aussi la victoire inédite d’un cheval de Troie éthique bien ficelé, une sorte d’infiltration subtilement bien pensée pour hacker les hautes sphères et leurs égoïsmes destructeurs. Peut-être qu’il y a là une discrète intrinséquisation (voir définition dans l’image ci-dessous) des sphères les plus extrinsèques (= néolibérales) qui soient ? Si c’était cela, et que les instructeurs de pleine conscience restaient toujours conscient de l’inégalité, de l’injustice, des ivresses du pouvoir peu compatissantes avec le reste du monde, avaient ici un accès direct à eux, avec dans leur besace les bons outils pour les faire changer… Alors ce serait un hack social assez épatant.

Le nouveau domaine des programmes de pleine conscience est-il un hack social qui peut intrinséquiser merveilleusement bien le monde ou le champ néolibéral a-t-il neutralisé ce domaine au point de le vider de tout potentiel de changement intrinséquisant ?

C’est ce que nous allons essayer de voir, mais avant cela, nous allons devoir bien comprendre ce qu’est la pleine conscience, voir ces différents programmes, inspecter leurs différents cadres. Il ne va pas s’agir de remettre en doute les excellents résultats individuels des pratiques de pleine conscience qui sont très bien établis maintenant, que ce soit ses bénéfices au niveau du cerveau, pour surmonter des difficultés psychologiques (dépression, anxiété), pour la santé en général. Mais d’en voir plutôt le cadre idéologique selon les différents programmes, voir si effectivement il y aura de quoi sauter de joie à observer ce cheval de Troie s’immiscer dans les hautes sphères ou, au contraire, si nous devrions plutôt nous en inquiéter, car cela traduirait une énième réappropriation d’un beau concept détourné à la sauce néolibérale, la rendant marché-compatible, et donc la vidant de tout pouvoir un tant soit peu révolutionnaire. C’est ainsi que ce dossier comportera deux grosses parties, l’un sur les programmes visant la pleine conscience, et l’autre sur les programmes qui visent la compassion : spoiler, si vous voulez suivre une pratique méditative individuelle vraiment éthique d’un point social, qui a un poids qui va au-delà du petit cercle de sa propre personne, qui n’est pas du tout néolibérale, choisissez celle qui vise la compassion, qui apparaît également bien plus empuissantante.

Les questions que nous allons aborder

Voici le chemin que nous allons prendre ensemble, dont les articles, bien que se suivant, pourront être lus de façon indépendante (du moins je vais tenter de les rendre le plus indépendant possible) :

NOTE : Si vous avez déjà lu le dossier sur la saillance de la mort, ou encore l’article que j’avais dédié à la pleine conscience (ici), seul un ou deux paragraphes seront repris dans #PCC2, tout le reste est nouveau, beaucoup plus poussé dans l’investigation, et issu de nouvelles sources , pris sous un angle différent.

Je mets d’emblée les sources par ordre de date de publication pour que vous puissiez inspecter à votre convenance avant d’entrer dans le sujet.


Sources


Livres

  • Plaidoyer pour le bonheur, Matthieu Ricard, 2003
  • Plaidoyer pour l’altruisme, Matthieu Ricard, 2013
  • Compassion, bridging practice and science, Tania Singer, Matthias Bolz, 2013 http://www.compassion-training.org/?lang=en&page=download
  • Handbook of Mindfulness and self regulation, Brian D. Ostafin, Michael D. Robinson, Brian P. Meier, 2015
  • La thérapie cognitive basée sur la pleine conscience pour la dépression, Z.V Segal, M.G. Williams, J.D Teasdale, 2015
  • Wired to Create: Unraveling the Mysteries of the Creative Mind, Scott Barry Kaufman, 2015
  • Mindful Work, how meditation is changing business, David Gelles, 2015
  • Handbook of Mindfulness, culture, context and social engagement  de Ronad Purser, David Forbes, Adam Burke, 2016
  • Vivre en pleine présence, manger, Thich Nhat Hanh, 2016
  • Introduction à la pleine conscience, Estelle Fall, 2016
  • Foutez-vous la paix, Fabrice Midal, 2017
  • Handbook of compassion science, Emma M. Seppälä, Emiliana Simon, Thomas Stephanie, L. Brown Monica C. Worline, 2017
  • Handbook of Ethical Foundations of Mindfulness, Steven Stanley, Ronald E. Purser, Nirbhay N. Singh (2018)
  • McMindfulness, Ronald Purser 2019

Articles/Vidéos Web

Notamment sur le thème de la compassion (« avoir de la compassion en des temps difficile ») :

Et sur la chaîne YouTube de l’université de Stanford, notamment des échanges avec Zimbardo, sur le thème de la compassion, de l’éducation et de l’héroïsme altruiste :

 

Articles scientifiques

La suite : Qu’est-ce que la pleine conscience ?

 


3Traduction du mot « empowerment » selon les termes d’Alain Damasio, que j’ai adopté également parce que je trouve cette traduction plus percutante que d’autres qui sont parfois employés tels que « autonomisation », « responsabilisation », « émancipation ».

Viciss Hackso Écrit par :

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15 Comments

  1. lily
    24 mars 2020
    Reply

    J’ai lu à peu près, on a le sommaire mais ce qui est développé dans le sommaire n’est pas là encore, est-ce donc dans d’autres articles la suite? Mais pas vu de lien

    Sinon vu la vidéo de DirtyBirlogy et j’ai l’impression qui parle plus de l’hypersensibilité dont les hypersensibles ressentent la douleur des autres comme si c’était la sienne et c’est un poids mais oui on peut compatir sans avoir pitié, en comprenant les personnes et ce qu’elles veulent! Même si peu le font surtout à cause de la société capitaliste, du racisme, de la misogynie, de l’homophobie, la grossophobie, le validisme et la discrimination de la « laideur » et si on peut contourner ça en se renseigner sur ça même s’il y a le fait que nos besoins primaires comme la survie priment où une personne pauvre cherche à survivre aussi et les personnes riches même si certaines donnent, d’autres sont en effet égoistes et s’enrichir toujours plus à cause de la société capitaliste et ses modes de pensées!

    Autre exemple d’une personne de série « Graceful family » qui en a aidé une autre sans faire preuve de pitié: Un gars était victime d’une injustice et devait payer alors que un de ses proches était à l’hôpital et devait subvenir à ses besoins, payer les factures de l’hôpital etc, une fille plus riche a vu la scène où des gardes essayaient de virer cet homme de son travail etc, à ce moment-là, elle a pris sa voiture, elle a dégommé sa voiture sur la voiture de l’homme et lui a donné la carte d’un avocat pour la poursuivre.
    En gros, elle l’a compris en compatissant sans faire de pitié en prenant des risques.
    J’aime cette façon d’aider alors que dans l’aide humanitaire pour certaines, on est dans la pitié et la pitié n’est jamais bonne quand on se sent supérieur à d’autres… quand des gens donnent en se disant j’ai une vie meilleure qu’eux…

    Et dans la série que je viens de parler « Graceful family », les perso principaux sont une famille de riche dont on suit la fille ainée qui revient en Corée du sud des Etats-Unis pour revoir son grand-père malade et découvrir la vérité sur la mort de sa mère. Même si on suit une famille de riche, c’est avant tout une histoire d’injustice que parle cette série que j’ai adoré, cette fille de riche en étant ados après la mort de sa mère a été envoyé aux USA à son insu par sa famille et une agence nommée TOP.
    Elle était surveillée aux USA par sa famille et cette agence secrète de procureurs et d’avocats au service de cette famille de riches, elle ne pouvait donc rien faire, sa famille mais surtout cette agence vont tout faire pour lui mettre des obstacles qu’elles restent tranquilles à rien faire. Mais cette fille à caractère bien trempée, va s’enfuir, revenir en Corée du Sud pour tenter de découvrir la vérité.
    Une histoire d’injustices malgré le milieu social de riche et une histoire de corruption, David contre Goliat dont David vainc quand même, est tenace, rusé etc. Ce n’est pas pour autant manichéen non plus, la méchante présidente corrompue de cette agence a été victime d’une injustice en tant que femme et a choisi le pouvoir, le capitalisme, il y a des répliques sur ça justement et des « héros » qui lui prouvent qu’elle a tort.

    Sinon pour revenir au sujet de la méditation xd comme je m’écarte, je n’ai rien contre ça même si je n’ai pas besoin de ça personnellement n’étant pas de nature angoissée, sachant me remettre en question etc. Quant à la réflexion que vous avez évoqué sur est-ce que c’est la solution des biais, je dirai oui et non, on peut prendre conscience des biais d’abord en s’informant sur ça, ensuite en se rendant compte de ça sur soi à des moments et il y a des biais plus faciles à éviter que d’autres. Par ex le biais de confirmation, les personnes arrogantes qui ne se remettent pas en question tombent hyper facilement dans ce biais et on peut éviter ce biais en se remettant justement en question en écoutant les autres et les preuves qui prouvent qu’on a tort.
    Mais le biais de l’énervement de gaspiller notre temps ou argent est parfois dur à s’en défaire mais on peut éviter les excès comme les exemples d’une personne qui a mangé un paquet de piments car peur de gaspiller lol, il y a des excès à éviter.

    • Viciss Hackso
      24 mars 2020
      Reply

      L’article n’est que l’intro du dossier, chaque ligne du sommaire fera l’objet d’un article que je publierais environ chaque semaine 🙂

      Concernant ce que dit DirtyBiology «  j’ai l’impression qui parle plus de l’hypersensibilité dont les hypersensibles ressentent la douleur des autres comme si c’était la sienne » en fait non, pas besoin d’être hypersensible pour vivre ce phénomène, c’est de l’empathie, et généralement, à moins de troubles particuliers ou de préjugés sur l’autre, elle est automatique (par exemple on grimace, on se tend quand on voit un héros dans un film souffrir violemment d’une blessure). On est très équipé pour réagir comme cela en tant qu’animaux sociaux, on a besoin de pouvoir se mettre à la place de l’autre, automatiquement. L’hypersensibilité ne concerne pas forcément l’empathie mais le coté sensoriel (être plus épuisé que les autres à cause du bruit, des odeurs ; une forte sensibilité à l’art, l’esthétique….).
      Mais effectivement tu as totalement raison lorsque tu dis que les discriminations sont des bloqueurs de compassion ou d’empathie. Et effectivement, les études montrent que c’est lié à notre modèle de société capitaliste et centré sur l’avoir.
      Pour la méditation et l’absence de biais, en fait je fais référence à une étude sur la pleine conscience et les biais  qui démontrent qu’effectivement être plus pleinement conscient (pas forcément via la méditation) empechent la personne de tomber dans les biais : https://www.hacking-social.com/2018/01/22/tmt1-quand-avoir-peur-de-penser-a-la-mort-rend-ethnocentrique-la-theorie-de-la-gestion-de-la-terreur/

      • Lily
        24 mars 2020
        Reply

        Ok par contre pour l’hypersensibilité, je parlais de ressentir les douleurs des autres comme si c’était la sienne et non je ne ressens pas ça en n’etant pas hypersensible. C’est une distance emotionnelle qu’on a mais qui diffère des uns des autres et qu’il y a moins chez les hypersensible qui sont des éponges. J’ai aussi une bonne « résilience » cette capacité à encaisser des chocs, des décès aussi et il y a des gens qui ont moins ça: encaisser des chocs, comme des critiques, des insultes, j’y arrive bien même si je ne me dévoile pas publiquement en n’étant pas une personnalité publiqie ou yputubeurs etc

  2. lily
    24 mars 2020
    Reply

    J’ai oublié de rajouter, les fictions nous apprennent beaucoup surtout les séries pour ma part, pour compatir et trouver aussi des modèles et des façons d’agir.
    J’ai aimé la personnalité de la fille principale de la série « Graceful famiily » et sa façon d’aider en comprenant la personne, ce qu’elle a besoin sans faire preuve de pitié et de paternalisme.
    Une autre scène iconique de cette série, sa famille riche a déboursé beaucoup avec beaucoup d’invités pour l’enterrement d’un poisson alors que son grand-père décédé, il y a eu moins de monde, moins d’invités prestigieux venues lol.
    Pour dénoncer ça de façon ironique, elle s’est habillée tout en rouge élégante à l’enterrement de ce poisson, elle a dénoncé ça avec classe.

    • Viciss Hackso
      24 mars 2020
      Reply

      Je suis totalement d’accord, la fiction est fondamentale pour transmettre des formes d’expériences (et des façons différentes de les vivre) ; de réflexions sur l’expérience, et les chercheurs montrent que cela stimule l’empathie (notamment pour les romans, en fait le cerveau vit les événements lus comme on les vivait nous, c’est donc une excellente simulation pour tous un tas de choses).
      Merci pour la découverte, je ne connais pas la série:)

      • Lily
        24 mars 2020
        Reply

        Mince mon com n’a pas marché je disais que je lis mais je ne vis pas les événements lus comme si je le vivais en plus que je lis majoritairement des thrillers et policiers qui ne m’arrivent pas dans la vraie vie et heureusement! Ce dont tu parles s’applique plus aux jeux vidéos surtout de réalité virtuelle où on perd le temps et tous nos sens, qu’on peut ressentir le vertige en vr alors qu’on est sur un sol plat etc

  3. Lily
    24 mars 2020
    Reply

    De rien, oui même si je lis aussi en préférant quand même regarder des séries et quand je lis, non je ne vis pas les événements lus comme si je le vivais moi et heureusement car je regarde et lis plus de thrillers, policiers que je ne vis pas en réalité et je lis aussi du contemporain.
    Ce que tu dis s’applique plus pour les jeux vidéos aussi les jeux de réalité virtuelle où là oui on perd tout, on peut avoir le vertige en vr dans une situation alors qu’on ne l’a pas dans la vraie vie. Avec la vr, on perd le temps et nos sens, notre vue est trompée etc

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